Pour les forces réactionnaires, l’école publique est un territoire clé de la « bataille culturelle » qu’elles mènent contre les forces progressistes. Les enseignant·es sont traditionnellement un électorat moins poreux aux discours de l’extrême droite. Elles et ils défendent majoritairement une école publique, gratuite, émancipatrice et inclusive incompatible avec un projet de société ultraconservateur, discriminatoire et inégalitaire. Pour les forces politiques autoritaires et d’extrême droite, l’école publique est à la fois un bastion d’adversaires politiques dont il faut se débarrasser et une terre de conquête pour faire infuser leurs idées sur le long terme.

L’école et la « bataille culturelle »

Dans cette entreprise de conquête, l’extrême droite profite des effets désastreux des politiques néolibérales. Les décennies de sous-investissements dans l’école publique ont laissé cette dernière exsangue. Les pénuries d’enseignant·es, les manques de remplaçant·es et la surexploitation médiatique de faits divers nourrissent la colère des usager·es et les thèses déclinistes de l’extrême droite. La rhétorique des discours du retour à l’autorité et à un âge d’or supposé laisse penser à l’électorat, et à une partie des collègues, que l’extrême droite est un antidote. L’expérience montre que rien n’est moins sûr, la suppression du ministère de l’Éducation nationale a été une des premières décisions d’Orbán, de Trump et de Milei.

Les syndicats, un contre pouvoir à supprimer

Les organisations syndicales défendent les collègues et font entendre un autre narratif. Elles sont en cela des places fortes pour résister. En Turquie, les combats d’Egitim-sen pour les droits syndicaux, la liberté d’expression, les droits des femmes, le droit à l’école publique laïque ont fait entrer le syndicat dans une autre dimension. Egitim Sen ne se définit plus seulement comme une organisation professionnelle, mais aussi comme « un acteur de la résistance sociale ». En Belgique, la CSC a développé une formation syndicale pour « dépolluer de manière ludique des idées nauséabondes d’extrême-droite ». Cette initiative originale, sous forme d’escape game (voir photo), a touché plusieurs milliers de personnes sur de nombreux lieux de travail et remporté le 3e prix du Comité économique et social européen, un organe consultatif de l’UE. Toujours en Belgique, lutte contre l’extrême droite et conquête sociale vont parfois de pair. La « coalition du 8 Mai », une alliance de syndicats, d’organisations et de personnalités a pour objectif de refaire du 8 Mai un jour férié (supprimé en 1983).

2500 personnes ont suivi la formation « dépolluer l’extrême droite »

CSC (Belgique)

Cette résistance courageuse peut cependant avoir des conséquences. En 2021, les locaux de la FLC-CGIL (Italie) ont été attaqués par un escadron fasciste. En Argentine, des bureaux de la CTERA ont été méthodiquement visités et des disques durs dérobés. Mais l’extrême droite ne s’attaque pas qu’aux biens, elle s’en prend aussi aux personnes. Les Secrétaires généraux de la FLC-CGIL et du Syndicat Uni des Travailleurs de l’Éducation de Buenos Aires SUTEBA sont nommément attaqués par le pouvoir politique dans les médias ou les réseaux sociaux. Une violence politique pouvant aller, en Argentine, jusqu’à des menaces de mort sur des proches. Plus récemment, en avril 2025, les membres du Bureau exécutif d’Egitim Sen ont été assignés à résidence.

L’échelon international, outil et protection

La lutte contre l’extrême droite est une préoccupation syndicale à l’échelle européenne et mondiale. Le SNES-FSU a participé avec d’autres organisations à la rédaction de résolutions, l’équivalent de motions, contre l’extrême droite qui ont été adoptées en 2024 par les congrès de l’Internationale de l’Éducation (IE) et du Comité syndical européen de l’Éducation (CSEE). Ces dernières prennent désormais vie à travers la constitution de réseaux internationaux d’experts et d’organisations syndicales et la mise en commun de données.

Solidarité internationale du Comité Syndical Européen de l’Education et de la Fédération Européenne des Services Publics (EPSU) lors de la pride de Budapest de 2025.

L’échelon international peut être un moyen de poursuivre une lutte. En Hongrie, le Président du PSZ-SEH se sert des institutions européennes pour continuer le combat contre Orbán. Le syndicat a saisi la Cour de justice de l’UE pour obliger le pouvoir en place à revenir sur les entraves au droit de grève. La solidarité syndicale internationale est également un moyen efficace de protéger celles et ceux qui défient les régimes autoritaires. Elle peut prendre des formes très variées : interpeller les autorités turques pour faire libérer des camarades emprisonnés, aider un syndicat argentin à organiser une grande manifestation de défense de l’école publique ou être aux côtés de celles et ceux qui vont participer à la Marche des fiertés interdite de Budapest.

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