François Hollande avait présenté l’opération Barkhane comme la décision la plus importante de politique étrangère de son mandat. Il s’était dit ému de l’accueil qui lui avait été fait par la population malienne en 2013. Si l’offensive de groupes djihadistes ou indépendantistes divers menaçait alors la capitale malienne, Bamako, et si l’intervention militaire française avait permis de l’arrêter, on peut se demander, comme nos camarades du SNEC, principal syndicat de l’éducation malien, si la présence française est encore justifiée sept ans après.

La responsabilité du massacre de civils le 3 janvier difficile à établir

Cette question est régulièrement posée, tant par de hauts gradés français qui doutent en coulisse du succès de l’opération et déplorent les lourdes pertes française (cinquante soldats depuis 2013) que par la population malienne, qui voit d’un mauvais œil une armée étrangère sur son sol, armée dont le but a longtemps été de sauvegarder un régime corrompu et titubant, jusqu’au coup d’État de l’été dernier. La question se pose avec plus d’acuité depuis la trouble opération du 3 janvier dernier, qui a vu l’armée française bombarder une « cible » djihadiste dans la région de Douentza, entre Mopti et Hombori, et dont le bilan est très controversé : lorsque l’Etat-Major français affirme que des cibles djihadistes ont été atteintes, des sources maliennes, issues de témoignages d’habitants de la zone , indiquent que plusieurs civils, probablement plus d’une vingtaine, ont été victimes des tirs français, en particulier parce qu’une fête de mariage se tenait dans la zone bombardée. RFI évoque un « dimanche sanglant » quand la presse malienne fait écho d’ « une centaine de morts civils ». Le bilan exact des bombardements sera sans doute difficile à établir mais il est établi que les mouvements rebelles, djihadistes ou non, se fondent dans la population civile dont ils ont souvent le soutien, menant inexorablement la France à une « sale guerre », d’où les opérations punitives ne sont pas exclues (l’opération a fait suite à la mort en quelques jours de 5 soldats français). Dans la zone de Douentza comme sur tout le territoire malien, seules les forces françaises, la MINUSMA (qui a d’ores et déjà dégagé toute responsabilité dans l’opération) et l’armée malienne ont la maîtrise du ciel, les guérillas locales étant dépourvues de tout moyen aérien.

Une présence militaire française de plus en plus contestée

Selon nos camarades du SNEC, la présence militaire française est devenue de « plus en plus impopulaire » et une manifestation pour en réclamer la fin est prévue le 20 janvier prochain, à l’appel de très nombreux syndicats et de partis politiques, dont le SNEC. L’intervention française n’a pas rempli ses promesses : les zones du nord et du centre du pays sont toujours en proie à la plus grande insécurité et lorsqu’elles sont à nouveau « sous contrôle », le retour à une vie normale, en assurant centres de soins et réouverture des écoles, ne se fait pas. Selon Moustapha Guitteye, secrétaire général du SNEC : « l’opération Barkhane a été un échec total au Mali et au Sahel. Depuis qu’elle a commencé, nous avons assisté à une montée en puissance des djihadistes, tant au nord du pays qu’au centre. Les attaques ciblées contre les communautés peuhls et dogons se sont multipliées ».

La manifestation du 20 janvier prochain demande « le départ pur et simple de toutes les forces étrangères ». Le secrétaire général du SNEC souligne le caractère symbolique de la date du 20 janvier : « c’est le 20 janvier 1960 que le premier président du pays (qui venait d’accéder à l’indépendance), Modibo Keita, a demandé l’évacuation des bases militaires françaises de Tessalit, Bamako et Kati. Pour les Maliens c’est une date de référence, une date historique. »

C’est donc un très large front syndical et politique qui se dresse aujourd’hui contre la présence militaire française.


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