Un état des lieux

Les écoles ont fermé depuis le 24 février, jour de l’attaque russe. Pendant quinze jours des « vacances exceptionnelles » ont été décrétées par le ministère de l’Éducation. Depuis le 14 mars, un enseignement « à distance », lorsqu’il est possible, a remplacé les cours. Actuellement, la réalité de l’enseignement est très variable, selon les régions. Dans l’ouest la plupart des élèves suivent cet enseignement à distance et leurs enseignants ont à cœur de garder un contact avec les élèves. Mais dans l’est et le sud, les destructions massives, y compris d’établissements scolaires, ajoutées aux alertes aériennes permanentes et à la fuite d’une partie des civils, rendent impossible un tel enseignement. Le gouvernement ukrainien estime que la moitié des enfants du pays a changé de lieu de vie depuis l’invasion russe.

Quant aux enseignants, si certains ont fui vers la Pologne ou d’autres pays d’Europe, la plupart sont restés en Ukraine, selon les responsables du STESU. Le système bancaire et le versement des payes des fonctionnaires n’ont pas été affectés par la guerre : « Les enseignants ont reçu leurs salaires pour le mois de mars », nous disent les responsables du STESU. Ils avaient aussi été payés en février. Cependant, comme le reste de la population, ils souffrent des conditions générales de la guerre : pénuries, coupures d’électricité, maisons ou appartements touchés par des frappes aériennes. Dans les villes du sud ou de l’est assiégées, certains ont emprunté les « couloirs humanitaires » mais beaucoup hésitent « ces couloirs ne sont pas sûrs, nous dit un responsable, nous ne croyons plus en la parole des Russes. Mais parfois certains d’entre nous n’ont pas d’autre choix ».

Les responsables syndicaux, eux, sont tous restés dans le pays. Après une période de stupéfaction et de relative désorganisation, le STESU a vite repris ses activités, principalement par voie numérique : « nos organisations régionales travaillent activement maintenant. Les dirigeants des régions les plus dangereuses ont fui vers l’ouest ou le centre du pays. Mais ils sont tous en Ukraine », nous indique un responsable. « Malheureusement, poursuit-il, nous n’avons aucune information sur la dirigeante de la section régionale de Tchernihiv. La dernière fois qu’elle nous a contactés, c’était il y a une semaine et à ce moment-là, elle se cachait dans un sous-sol. Nous essayons de trouver des informations sur elle et espérons qu’elle est en vie ». Tchernihiv – Tchernigov en russe- est une ville russophone de 280 000 habitants au nord-est de Kiev, à une cinquantaine de kilomètres de la frontière biélorusse, qui subit un siège et d’intenses bombardements depuis trois semaines.

Une solidarité interne et internationale

Le STESU, depuis le début du conflit, a tenté de recenser toutes les demandes de ses membres, et dans un premier temps tout simplement de les contacter, ce qui n’était pas toujours facile. « Au début de la guerre, – explique une responsable,- nous n’avions pas d’informations sur nos adhérents parce que c’était vraiment le chaos dans tout le pays. Beaucoup de gens changeaient de logement tout le temps et c’était difficile d’obtenir des informations sur le nombre de personnes déplacées, parties à l’étranger ou les lieux dans lesquels les autres s’étaient réfugiées en Ukraine. »

Depuis que les fronts se sont plus ou moins stabilisés, le recensement des adhérents et des besoins est possible : « Nous avons beaucoup de travail à présent. Nous avons reçu de nombreux messages d’appel à l’aide. Nous essayons de faire de notre mieux et de fournir aux gens un logement et de la nourriture, mais nos ressources sont limitées ». Un autre responsable le confirme : « Notre syndicat a reçu beaucoup de demandes d’aide de la part de nos membres. Le syndicat fournit une aide financière directe aux membres du syndicat dont les maisons ont été totalement détruites. Nous fournissons une aide humanitaire à ceux qui n’ont pas de vêtements et de nourriture et organisons des lieux de vie temporaires pour les réfugiés à l’intérieur de Ukraine ».

D’autre part, le STESU continue de diffuser beaucoup d’informations aux enseignants sur son site internet, alimenté chaque jour : il comporte des articles sur les aides aux personnes déplacées accordées par le gouvernement et la manière de les percevoir (2000 hryvnias par adulte et par mois, ce qui équivaut à 61 euros, et 3000 hryvnias par enfant, soit 92 euros), de la loi sur les nouvelles conditions de travail en temps de guerre ou d’informations sur les soutiens internationaux que l’Ukraine a pu récemment obtenir, comme la traduction d’une tribune de Randi Weingarten, présidente de l’AFT – l’un des deux grands syndicat américains de l’éducation -, parue dans le New York Times.

L’Internationale de l’Éducation a fait début mars un appel aux dons à destination des tous ses membres. Beaucoup de syndicats européens ont contribué. Le but annoncé était d’aider les deux syndicats ukrainiens affiliés à l’IE à fonctionner dans la guerre, à organiser une solidarité envers leurs membres et à se reconstruire après un cessez-le-feu éventuel. « Les responsables de l’IE nous ont parlé de ces fonds collectés. Nous sommes très reconnaissants pour cet acte de solidarité ! » déclarent les responsables du STESU. « Une partie de la contribution de l’IE sera envoyée aux sections syndicales régionales des zones les plus détruites, là où les gens ont quitté leurs maisons détruites et endommagées. Ces sections régionales font de leur mieux pour aider leurs membres sur place. Nous allons également utiliser l’argent pour payer l’électricité et les frais de services publics dans notre centre situé dans la partie occidentale du pays, où les personnes originaires de l’est de l’Ukraine séjournent actuellement. Nous ferons tout ce que nous pourrons » ajoutent-ils. Le STESU souhaite que l’utilisation de ces fonds se fassent en toute transparence : « au cas où l’IE ou une autre organisation membre voudrait savoir comment l’argent a été dépensé, nous pouvons fournir des informations sur toutes les dépenses effectuées ».

Nos contacts en Ukraine ne se plaignent jamais de la situation pour eux-mêmes, l’un d’eux écrit : « il y a eu des bombardements pas très loin, mais pas ici. Nous avons de la nourriture, nous avons de la chance en comparaison avec d’autres villes. Je n’ai l’intention d’aller nulle part maintenant, car ici c’est l’Ukraine. Je ne veux pas quitter mon pays. »


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