Des centaines de milliers de réfugiés

En moins d’une semaine, ce sont probablement 200 à 280 000 réfugiés en provenance d’Ukraine qui sont arrivés sur le sol polonais. La frontière est ouverte à tous ces réfugiés et la population polonaise fait preuve d’une vraie solidarité. « Il y a actuellement plus de 200 000 réfugiés ukrainiens en Pologne » indique Dorota Obidniak, responsable des relations internationales du ZNP, « ce sont principalement des femmes et des enfants car les hommes ont été mobilisés et ne peuvent plus quitter l’Ukraine. Des dizaines de milliers de réfugiés attendent actuellement à la frontière. On estime que si la guerre continue, la Pologne pourrait accueillir 4 millions de réfugiés ». Ce chiffre vient d’être confirmé par le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies.

Si l’Ukraine a aussi des frontières avec la Roumanie, la Slovaquie et la Hongrie, la route vers la Pologne est de loin privilégiée par les réfugiés pour plusieurs raisons : la frontière est plus longue et les points de passage plus nombreux qu’avec les autres pays occidentaux, la proximité linguistique favorise des échanges plus faciles et beaucoup d’Ukrainiens ont de la famille en Pologne où les immigrés d’Ukraine étaient près d’un million avant le conflit. Beaucoup de Polonais ont aussi des ancêtres ukrainiens et ne l’ont pas oublié dans l’élan de solidarité qui se dessine depuis une semaine.

Les enseignants et leurs organisations syndicales en lien avec leurs collègues ukrainiens

Le ZNP, principal syndicat enseignant, a depuis longtemps des contacts avec des syndicalistes ukrainiens : «bien avant la guerre, nous avons coopéré avec un syndicat enseignant ukrainien, le STESU, au niveau national et au niveau local, organisé des douzaines de séminaires et voyages d’études ensemble » signale Dorota Obidniak, « des liens chaleureux se sont tissés » et le président du ZNP, Slawomir Broniarz, à l’heure actuelle, est encore en lien téléphonique régulier avec les dirigeants syndicaux ukrainiens. Ainsi, dès le début du conflit, le ZNP a déclaré tout son soutien aux enseignants ukrainiens tout en souhaitant une issue diplomatique.

Aujourd’hui, le ZNP, en contact avec des responsables syndicaux de Kiev et un député ukrainien de la région de Vinnytsia (sud ouest de Kiev), rapporte que « nos interlocuteurs ukrainiens nous ont signalé le rapide changement de la situation entre le début de la semaine (le 21 février) et la fin de la semaine. Dans plusieurs parties du pays, les troupes russes sont passées à l’offensive et il est difficile de prévoir l’évolution de la situation. Selon nos amis ukrainiens, les attaques sur les équipements civils sont fréquentes, écoles et crèches comprises. L’enseignement a pratiquement cessé en raison des mises aux abrisdéclenchées par les sirènes d’attaques aériennes. Les élèves descendent dans les abris souterrains et sont terrifiés. » Le ZNP communique aussi régulièrement avec des responsables syndicaux de Lviv, Ivano-Frankivsk et Ternopil (ouest de l’Ukraine).

Tout faire pour secourir les familles et scolariser rapidement les enfants

Les réfugiés sont tous partis précipitamment, parfois dans l’espoir d’un refuge très temporaire, et sont donc particulièrement démunis : beaucoup n’ont emporté avec eux que leurs documents d’identité, quelques souvenirs familiaux et quelques vêtements de rechange. Pour soulager l’angoisse des enfants déplacés souvent dans l’absence de leur père, l’une des premières actions des structures caritatives polonaises a constitué en distributions de jouets.

Le ZNP mobilise toute son énergie pour venir en aide aux réfugiés ukrainiens, en proposant des collectes, une aide en médicaments, nourriture et vêtements, des propositions d’hébergement. Il centralise toutes les propositions sur son site internet « sur notre page d’accueil de notre site, nous avons une large partie consacrée à l’aide aux réfugiés, chaque jour nous diffusons de nouvelles informations et propositions » indique Dorota Obidniak.

Dans l’ensemble la société polonaise s’est montrée très solidaire. Le ZNP le souligne : « la mobilisation des Polonais pour venir en aide aux réfugiés a été extraordinaire. Des milliers de volontaires se sont engagés sur les points d’aide et d’enregistrement aux frontières. On collecte partout de l’argent, de la nourriture, des produits d’hygiène, des vêtements. Des transports d’enfants malades ou blessés en provenance des zones de guerre ukrainiennes vers des hôpitaux polonais sont organisés. Des activistes de la cause animale ont même mis en place une logistique pour transporter des animaux des zones touchées par les bombardements en Ukraine vers la Pologne. »

Les questions linguistiques sont importantes, car même si le polonais et l’ukrainien sont des langues proches, elles ne sont pas inter-compréhensibles. Pour aider les réfugiés de langue ukrainienne à s’informer, la télévision polonaise a réservé un canal qui émet 24h sur 24 des informations en ukrainien.

Actuellement, dans la perspective d’une guerre longue et d’une scolarisation des jeunes réfugiés, le ZNP collabore avec des experts dans l’enseignement du polonais comme langue étrangère. « Nous prévoyons de nous investir dans le recrutement et la formation d’enseignants de polonais langue étrangère, ainsi que dans la formation d’intervenants interculturels » annonce Dorota Obidniak.

Dessins d’élèves polonais en solidarité avec l’Ukraine

La société polonaise très affectée par la crise

Il faut aussi soutenir psychologiquement les élèves, très affectés par la crise et parmi eux, les quelques 60 000 enfants et adolescents ukrainiens qui fréquentaient déjà avant la guerre les écoles polonaises, du fait de la présence de l’immigration de travail.

Les enfants polonais sont aussi “terriblement affectés” note Dorota Obidniak. « Les adolescents s’engagent comme volontaires », « mais il faut tenir compte du fait que la pandémie a déjà causé de nombreuses peurs et traumatismes – la Pologne compte plus de 100 000 morts de la covid-, les changements continuels dans l’enseignement les a fragilisés. Les jeunes se souviennent aussi de la situation à la frontière polono-biélorusse il y a quelques mois, et des commentaires hostiles des autorités polonaises. Faire comprendre tout cela aussi est un grand défi pour les enseignants. »

Pour mieux faire comprendre la situation à leurs élèves, les enseignants disposent « de documents explicatifs qui sont téléchargeables sur notre site » ajoute la responsable internationale du ZNP. « Cette semaine, nous allons commencer à enregistrer une série de podcasts sur l’histoire de l’Ukraine, les relations entre la Pologne et l’Ukraine, ce qui aidera les enseignants à lutter contre les stéréotypes qui émergent. Tout cela est réalisé sous le contrôle d’experts éminents, des universitaires, des chercheurs et d’anciens diplomates qui nous aident ».

Dans l’ensemble, la situation reste traumatisante: notre interlocutrice conclut : « les Polonais ont peur. Ils sont historiquement conscients des dangers qu’entraîne une Russie voisine dirigée par un dictateur ».


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